La transformation d’un musicien témoin du racisme et du nationalisme de son époque. La révolution du Klezmer.
Un klezmer allant de villages en villes animer des fêtes et des cérémonies.
Transformation : la fête
Les frères, les cousins, les neveux accordent leurs instruments. Un grand cercle se forme autour d’un grand feu. La plupart des membres de la famille sont assis, une forte odeur de viande grillée plane au-dessus d’eux. Les guitares donnent le rythme, d’abord lentement puis de plus en plus rapidement. Le klezmer est captivé. Comme son violon lui manque à présent ! L’enfant se colle à lui, tant il est intimidé, Elijah lui serre le bras. « Tu as bien dû rencontrer des Tziganes durant ta pérégrination. – Oui, mais je les ai toujours évités. – Ne nous appelle pas Tzigane, l’ami, nous sommes des Roms, des Romungros pour nous distinguer de nos frères valaques ! s’exclame l’hôte assis à leurs côtés. Et toi Gadjo, joue-nous quelque chose avec ton violon ! », demande-t-il au garçon. Istvan regarde son aîné, gêné. Elijah l’encourage par un hochement de tête.
L’enfant
L’enfant sort son instrument puis, tout en restant debout, plaque une mélodie sur le tempo soutenu des frappés de mains, des guitares et des cymbalums. Les violons le rattrapent aussitôt, les accordéons le suivent sans tarder, les exclamations l’incitent à accélérer. Une femme entonne un chant venu des profondeurs du voyage, tous les musiciens le reprennent en saccadant le rythme. Puis Istvan poursuit par des airs hongrois. Cette fois ce sont les enfants qui l’accompagnent, petits et grands, ils déploient avec prouesse leurs talents. Istvan a su se faire adopter par la tribu, par sa spontanéité et son archet, il a perdu en même temps tous ses préjugés.
Transformation : musique
Elijah prend sa flûte. Il connaît le répertoire de ces gens, appris lors de ses prestations avec ses amis. Il était quelque-fois le seul klezmer dans un ensemble tzigane, le plus souvent c’était l’inverse, mais là il se sent d’improviser dans la nuit chaude et étoilée. Évidemment il serait plus aisé pour lui d’avoir un violon, il pourrait même emprunter celui d’Istvan, mais il ne tient pas à lui faire de l’ombre. Elijah joue un air csángó, il ne s’aperçoit pas qu’il est désormais le seul à jouer, tant il est absorbé. Puis il poursuit par une mélodie ashkénaze. Il est très vite rejoint par son jeune compagnon. Une joute est lancée, klezmer contre tzigane. Mais les équipes sont inégales, le duo est très vite écrasé par les chants. Elijah abandonne, mais pas son acolyte.
La joie
Le klezmer écoute les mots qu’il ne comprend pas, il s’imprègne de la joie arrogante venue de l’orient. Lui vient à l’esprit la remarque du jeune orphelin lors de leur rencontre, à propos de sa tristesse. Pourquoi donc les klezmers apportent-ils tant de joie à leurs auditeurs, pourtant plus enclins qu’eux à tourner en humour leurs malheurs, alors qu’ils dégagent eux-mêmes tant de sérieux ? Peut-être justement parce qu’ils ne vivent pas en clan, qu’ils sont seuls et sans tribu. Son voisin, un homme d’une quarantaine d’années, lui tant une écuelle garnie de viande et de haricots. « Tu joues de la flûte comme si tout ton corps ne demandait qu’à rire et, pourtant, tu te retiens de pleurer ; alors laisse tes larmes sortir avec tes notes inspirées et ton rire rejoindre nos chants de liberté. » Elijah reste bouche bée, l’homme aurait-il lu dans ses pensées ?
« Que le deuil noir mange ma mère si je mens, tu es un sacré bon musicien l’ami ! Comment te nommes-tu ? – Elijah. – Szabolcs, je suis l’un des fils de celui qu’on a enterré aujourd’hui, dit l’homme en se signant, je n’ai jamais entendu tant de sons sortir d’un si petit instrument. Tu as dû sacrément t’entraîner. – C’est mon métier, je suis klezmer. »
Le bonheur
La fête se poursuit jusqu’à tôt le matin, chacun relançant un chant, une mélodie ou une danse, quand il sent le silence s’éterniser plus de deux minutes. La nourriture, l’alcool et le tabac circulent sans cesse. Elijah boit plus qu’il ne devrait, il oublie la fatigue et les soucis du voyage, il goûte à l’instant présent qui ne lui apporte que du bonheur.
Une épopée dans les contrées d’Asie. Narambaatar, le personnage principal, n’a que 9 ans lorsqu’il est contraint de quitter le désert de Gobi pour atteindre la Chine. Pourtant, son parcours initiatique le mènera dans de multiples contrées d’Asie, de la Mongolie à Katmandou. Ces multiples lieux auront tous un rôle capital dans la construction spirituel du personnage principal et de ces amis. Roman la voie de l’errance.
Une invitation au voyage
« Les voyageurs parvinrent à un sentier dégagé. Les nombreuses empreintes d’animaux indiquaient qu’il venait tout juste d’être fréquenté. Ils purent enfin marcher normalement. Une petite grotte les invitait à s’y reposer ; ils s’y dirigèrent avec empressement. Un trompe-l’œil, une erreur de jugement, un gouffre impressionnant les attendaient. »
Une odyssée spirituelle
Bouddhisme, animalisme, chamanisme… Cet ouvrage est une vraie mine d’informations. Narambaatar et ses camarades seront confrontés à de nombreuses pratiques religieuses. Ces-dernières sont d’ailleurs illustrées avec minutie par l’auteur.
Je remercie énormément l’auteur, 5 sens éditions et simplement pro. La couverture est en accord avec le roman, le klezmer Un petit mot sur la musique klezmer est une tradition musicale instrumentale des juifs ashkénazes (juifs d’Europe centrale et orientale).
Contexte
Nous sommes en 1925 et Elijah voyage de village en village avec son violon afin de proposer ses services de musicien. Nous plongeons au cœur de la Transylvanie Roumaine et à la découverte de sa culture, c’est passionnant!J’ai apprit beaucoup avec ce livre. L’époque ou évolue Elijah est une période trouble, la pauvreté, la violence, l’extrémisme, le racisme..sont partout. Il va rencontrer de nombreux personnages sur sa route, on peut dire que ce voyage est pour lui une quête initiatique , chaque personne qu’il va rencontrer va changer son destin, chacun à leur manière. C’est un beau voyage, le personnage évolue et nous,nous apprenons beaucoup de lui. La plume de Jean-Luc est belle, sensible, touchante et riche.C’est un auteur généreux qui offre beaucoup à ses lecteurs.
La détente est l’amie du corps et de l’âme. Quand une personne la trouve, dans un environnement dépourvu de tensions et riches de distractions, elle irradie de bonheur son corps jusqu’alors crispé. Ainsi il relâche intérieurement, confiant pensées et résistances au vent. La trouve-t-on seulement dans la fuite du champ de bataille ? Si elle est associée au souffle, alors elle est présente dans l’action comme dans l’inaction. Son coin de prédilection est le silence dans les gestes et la voix. Pour la communauté, où le lieu de travail et l’habitat ne sont pas séparés, la suspension s’impose dans les journées, tels les silences sur une partition. Pour que la mélodie soit agréable à jouer et à écouter, un équilibre est à trouver. Se limiter au minimum pour sa tranquillité, la tension grandit alentour ; exceller dans la générosité, la détente nous comble et contamine nos proches.
Les frères
Après avoir aidé ses amis bergers jusqu’à la désalpe, Laurent était resté dans le village valaisan chez le propriétaire du consortium, pour traire les bêtes et curer l’étable. Il acceptait n’importe quels jobs, avide de passer sa hargne dans l’effort constant. Dans ses rares moments de liberté, il courait les sommets. Lors de ses nuits agitées, il écrivait ses pensées. Suite à sa déconvenue, qui l’avait fatalement écarté de son rêve de collectivité, ses deux frères lui avaient fait la surprise de le visiter en Suisse. Ils avaient relaté les lettres et leurs contenus, l’échec de Tristan, le renoncement de Bleiz à ramener le benjamin au bercail. Tristan gardait son idée d’engagement pour la nation, Bleiz s’orientait dans la taille de pierre, Enora aux beaux-arts, Laurent ne reprendrait pas les études. N’en déplaise à sa mère, il serait berger. Les frangins s’étaient consolés en de grandes virées sur les hautes crêtes, scellant le pacte de ne jamais se laisser tomber.
« Le roman d’un juif ashkénaze. La Révolution tranquille d’un musicien témoin du racisme et du nationalisme de son époque.
Laissez-vous emporter par la petite musique de ce roman à la suite d’Elijah, en pleine révolution, dans la Roumanie de l’entre-deux-guerres. »
Réédition numérique : extrait
Elijah parcourt la Bucovine, le haut pays des hêtres. Un pays montagneux peuplé de plusieurs minorités, vestiges du négoce ou des conquêtes, des loups et des ours. Comme en Transylvanie, il ne sait jamais sur quelle population villageoise il va tomber. Elle forme des groupes le plus souvent de langue slave, parfois de langue allemande. Comme autant d’îlots dans la mer intérieure moldave, elle-même incluse dans l’océan roumain. Le klezmer est hébergé dans des foyers polonais, ukrainiens, houtsoules ou vieux russes. Des bûcherons très traditionnels et hospitaliers. Il y mange invariablement de la mamaliga à toutes les sauces. Aussi du fromage fumé et des boulettes de viande, en échange de mélodies pour égayer les soirées.
Réédition numérique : racisme
Il ne se risque pas à sortir son répertoire yiddish. Dans les villes qu’il a précédemment traversées, ou à proximité des imposants monastères aux fresques éblouissantes, il a assisté aux vexations, aux brusqueries à l’égard des Juifs et des Roms. Des cibles de choix des défenseurs de l’orthodoxie. Ils les accusent d’être communistes, de voler leur pain ou bien de détourner l’économie à leurs profits.
Pauvreté
La population est pauvre c’est un fait, mais leurs maisons sont d’une richesse inouïe d’ornementation digne des palais des sultans. Chaque fois qu’il pénètre l’habitation de ses hôtes, il ne peut s’empêcher de s’arrêter sur le pas de la porte, contempler la beauté des boiseries qui ornementent aussi bien les vérandas que les puits, il s’imprègne ainsi de l’art populaire des peuples des Carpates. Tout est brodé ici, tout est coloré aussi, portes, fenêtres, tentures, habits et même les œufs de Pâques qui veillent sur les étagères. Mais la joie des yeux et le bonheur des sens ne peuvent lui ôter la peine qu’il éprouve en son cœur.